Management fees et externalisation des fonctions de direction

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Sommaire

Aujourd'hui, de plus en plus de groupes se structurent autour de sociétés holdings pour des raisons opérationnelles, juridiques, financières et fiscales.

 Ce type d’organisation pose la question des management fees et, plus généralement, de l’organisation des flux entre la holding et les différentes filiales. Ces flux sont de natures variées et peuvent être regrouper en quatre catégories : les dividendes, les flux financiers, les prestations de services et enfin les fonctions de direction.

De manière générale la mise en place d’une convention de management fees soulève des risques fiscaux. L’administration fiscale contrôle la réalité des prestations, la justification des montants facturés et l’absence de double emploi avec les fonctions normalement dévolues aux dirigeants des filiales

Une attention particulière est donc requise lorsque les services rémunérés au titre de la convention de Management fees incluent des missions normalement dévolues aux dirigeants : prestations de conseil et d’assistance dans les domaines financier, comptable, commercial et des ressources humaines.

Le présent articles concerne donc l’articulation entre convention de management fees et externalisation des fonctions de directions.

Ces sujets font l’objet de nombreux contrôles par l'Administration fiscale. Dès lors, il est essentiel de sécuriser ces flux,sans pouvoir toutefois éliminer tout risque de contestation.

Cette sécurisation passe notamment par :

-       L’identification des services rendus et de leur nature dans la convention de management fees ;

-       Une tarification adaptée et conforme au marché ;

-       Une documentation rigoureuse à des fins de justification.

La validation des management fees portant sur des fonctions de direction

 Le Conseil d'État a apporté d'importantes précisions sur le traitement de ces conventions. Dans l’arrêt Sté Collectivision (Conseil d’État,20 décembre 2003, n°466887), il reconnaît la validité de ces conventions sous certaines conditions :

« La conclusion d’une convention de prestations de services avec une autre société pour la réalisation, par le dirigeant de la première, de missions inhérentes à celles qui lui sont normalement dévolues ne relève pas d’une gestion commerciale anormale si cette société établit que les organes sociaux compétentes ont entendu en réalité rémunérer indirectement le dirigeant et qu’ainsi ce versement n’est pas dépourvu pour elle de contrepartie (…) »

Dans ces conclusions, Madame Émilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique, souligne d’ailleurs :

« En elle-même, la décision de verser à son gérant ou dirigeant une rémunération indirecte plutôt que directe n’emporte pas appauvrissement d’une société. Au contraire, elle peut même, lorsque le montage permet d'éviter le versement de cotisations sociales, réduire la charge liée à la rémunération des fonctions de direction. La pratique est peut-être pensable, voire susceptible, si tant est qu’elle n’ait eu d’autre but, de caractériser une fraude aux cotisations sociales ou de soulever des interrogations sur la TVA déduite, mais elle n'appauvrit pas l’entreprise ».

Cette jurisprudence précise donc que la rémunération indirecte d’un dirigeant via une convention de management fees est admise si elle est ratifiée par les organes sociaux et qu’elle correspond à une contrepartie réelle pour la société

Une rémunération des Management fees ratifiée par les organes sociaux

Outre une tarification de pleine concurrence, cette décision pose deux conditions cumulatives pour la déduction des services de direction :

-       d’une part, les organes sociaux compétents doivent, de façon expresse, reconnaître qu’il s’agit d’une rémunération indirecte du dirigeant ;

-       d’autre part, ce versement ne doit pas être dépourvu de contrepartie.

La sécurisation des sommes versées, en contrepartie de services de direction externalisée, impose un accord formalisé des organes sociaux compétents de la société bénéficiaire. En conséquence, le respect des obligations inhérentes au fonctionnement juridique est donc indispensable.

Il est également nécessaire de procéder à une analyse globale de la situation afin de s’assurer que les fonctions de direction ne donnent pas lieu à une double rémunération.

 De nombreuses organisation concernées parles management fees

 En pratique, plusieurs situations sont concernées par les précisions précitées. Il s’agira notamment des situations ci-après :

-       Lorsque certains des salariés de la holding, dont les rémunérations sont refacturées via des conventions de prestations de services, sont dirigeants non rémunérés des filiales ;

-       Lorsque le dirigeant d’une société est rémunéré par la société holding, qui refacture des prestations à ses filiales ;

-       Lorsque,des dirigeants personnes physiques, non associés, facturent leurs fonctions de direction via une société unipersonnelle.

Conclusion

Il convient de relever que la jurisprudence précitée ne fait pas l’objet d’une application homogène sur tout le territoire national(notamment : Cour administrative d’appel de Paris, 22 novembre 2024,n°23PA01336 et Cour administrative d’appel de Nancy, 15 novembre 2024,n°22NC02974).

Dans ce contexte, chaque convention de Management Fees doit faire l’objet d’une analyse détaillée et minutieuse. L’enjeu est de bien délimiter les flux de prestations et de direction afin de sécuriser leur traitement fiscal en conformité avec les règles applicables.

Malik KAOUANE - Avocat en Droit des Affaires

Ugo Vianez - Avocat spécialiste en Droit Fiscal